Il venait de Bourg-sur-Mer et elle de Cagnes-en-Bresse.
Il était homme de joie et elle, fille d’église.
Il s’appelait De Mol. On l’appelait l’abbé Mol.
Il l’avait mariée en couches et elle avait accouché à l’église.
L’âne tétait l’enfant dans la crèche.
Sur la paille, la mère nourrissait le bœuf. On l’appelait la Mère De Mol.
Les grenouilles fidèles n’arrivèrent que trois jours plus tard : tant va la cruche à l’eau qu’il faut partir à point.
Elles avaient l’enfant en ligne de mire pour le mettre en sang. Elles attendaient l’heure pour lui arracher les cuisses. Et comme qui mange un œuf mange un bœuf, elles s’en firent un steak, laissant la mère sur la paille.
- Toutes les mêmes ! pensait l’abbé Mol.
- Elles me font chier ! criait la Mère De Mol.
Mais l’enfant-tronc cicatrisait bien.
Les poules de bénitier lui jetaient des œufs d’or.
L’âne fut sevré, l’enfant fut têtu.
Pour le faire marcher, l’abbé lui mettait une talonnette au moignon droit.
A présent, le petit se déplaçait joyeusement sur une planche à roulettes.
Puis revenait se lover chez son père qui, tendrement, lui enfonçait des coups de fourchette dans les mains ou lui brûlait les bras avec de la cire fondue.
L’enfant, touché par tant d’amour, s’épanouissait, sortait maintenant, l’âne sur le dos.
Quand la mère tomba en enfance, il prit les jambes à son cou.
A huit ans, il rencontra une femme sans bras qui réussissait haut la main.
Les doigts dans le nez.
De cette belle union naquit un nouveau petit De Mol.
Un enfant qui…
Un enfant tellement…
Un enfant si laid qu’ils durent le jeter.